Adieux…

Muguette m’a recopié des recettes qu’elle avait mises dans une enveloppe sur laquelle elle avait écrit “Pour Mme Abigaïl, de la part de Muguette”. 

Yannick m’a dit que j’allais lui manquer.

Nestor est mort. On n’a pas eu besoin de se dire au revoir. J’ai pleuré quand même.

Il a pleuré dans mes bras. Il a dit que c’était pas possible que je parte, pas moi. J’ai répondu que si, qu’il n’était pas seul. Et moi j’ai pleuré après avoir fermé la porte.

Adélaïde a dit bon ben j’espère que le suivant est gentil comme vous.

Hortense m’a dit “ça devrait pas être vous qui devriez partir, ça devrait être lui”. J’avais jamais rien dit de tout ça, elle avait compris.

Germaine et Germain m’ont apporté une énorme plante qu’ils avaient bien du mal à porter avec leurs boîteries et leurs cannes.

Bénédicte m’a dit “on devrait pouvoir faire une copie de vous et la poser à côté de ma mère, ça la rassurerait”.

Sébastien m’a regardé de ses yeux bons, tout mouillés, m’a serré la main et m’a dit bonne chance.

Robert m’a serré la main, plus que de raison, en disant “bon ben bon ben bonne continuation, bon ben bon merci, halala, halalalalalala”

Patrick m’a offert un cadeau avec un petit mot “merci pour tout”. Il n’était pas mon patient mais aidant.

Georges a dit “Mais alors vous nous abandonnez ? Comme ça ? Mais vous n’avez pas le droit ! Mais enfin !”

Léontine m’a souhaité bonne chance, m’a dit qu’ils s’adapteraient tous, qu’ils s’adaptent toujours. Après qu’elle soit sortie du bureau, sa fille m’a dit qu’elle avait pleuré avant de venir me le dire.

Bertrand m’a demandé s’il pouvait prendre une photo de moi, pour garder un souvenir. “Non, ne regardez pas l’objectif, regardez l’ordi, comme vous faites d’habitude”. Et puis il m’a apporté la photo, et j’ai trouvé que c’était une bien jolie photo, et que c’était bien tombé le jour de mon T-shirt rose, ça me donnait bonne mine.

Léane a dit que c’était dommage de perdre un médecin qui aime autant Zelda qu’elle.

Pascal m’a dit qu’il avait confiance en moi et puis il m’a raconté toutes les violences subies. Cinq ans que ma porte était ouverte, cinq ans à tourner autour du pot, et puis l’urgence de le dire peut-être.

Barbara a dit que c’est dommage que je ne serais plus là pour suivre les jumeaux.

Marguerite m’a frotté le bras et m’a dit en bégayant que je lui manquerai.

Géraldine a dit que ce serait pas pareil avec un autre et que forcément son diabète irait moins bien.

Léa m’a offert un cadeau, en rapport avec toutes les souffrances qu’elle m’a racontées en me disant “vous comprendrez”.

Paul m’a regardé, les yeux tout mouillés en me souhaitant bonne continuation.

Cinq ans ensemble. Je n’oublie pas…


4 réflexions sur “Adieux…

  1. J’aurais pu écrire la même chose (en moins bien dit, évidemment…)
    Un an après mon déplaquage, je suis toujours très nostalgique. Je pense toujours à eux, ils me manquent.
    Par chance mes collègues étaient géniaux, et ils me manquent encore plus..
    Bisous

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  2. en lisant le titre je me suis dit Merde elle arrête d’écrire, ensuite je me suis dit Mais elle quitte déjà sa nouvelle vie ? et puis ensuite, j’ai reconnu tes patients, et j’ai à nouveau été émue de ces mots si pleins d’amour.

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