Il parle depuis un moment. Je trouve qu’il a beaucoup changé depuis que nous nous connaissons. Oh, certes, il est toujours dépressif, mais il y a eu des hauts, et il y en aura encore. Un jour, il sortira définitivement la tête de l’eau.
Je glisse quelques mots entre les siens. Je prends le temps, je parle lentement. Je sais que je suis en retard, mais il a besoin de ce temps.
Je vois ses yeux se mouiller, je glisse le paquet de mouchoirs vers lui. Il en attrape un, se mouche, et puis me dit :
« Je dois vous dire quelque chose, Docteur, je crois que vous vous êtes trompée de voie, vous auriez dû être psychologue, vous avez une telle gentillesse, oui, et une telle douceur, vous écoutez bien et vous m’avez aidé, je vous remercie, je crois même que parfois je me crée des symptômes pour venir, parce que ça me fait du bien »
Je suis assez surprise, je ne m’y attendais pas et je ne sais pas trop quoi répondre. A l’intérieur de moi, ça me fait tout bizarre, et je bredouille un truc incompréhensible en souriant doucement.
Il se mouche encore puis reprend là où il en était quelques minutes avant.
Un peu plus tard, il quitte mon bureau, les yeux secs.
Je le regarde partir, du baume sur mon cœur, sachant qu’il a tort, je ne me suis pas trompée, je fais le métier pour lequel j’étais faite. Et je le fais du mieux possible.
Ce sont les autres qui, souvent, nous révèlent à nous-mêmes.
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Très jolie vignette clinique c’est ça le métier que nous aimons
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Quelle chance pour lui et bravo à vous
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Je vous remercie, cet article d’une profonde humanité me bouleverse. C’est beau, pur, et beau.
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Trop mignon 🙂 Merci d’avoir partagé cette consultation avec nous ! Ce sont ce genre de patient qui nous rappellent pourquoi nous faisons ce métier…
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