Dance me to the end of love

Tu te souviens, c’était les dimanches. C’était quand ma mère posait un disque dans la chaîne et que la musique diffusait dans toutes les pièces de la maison. Il était impossible de s’isoler, impossible de ne pas entendre, le moindre son inondait chaque pièce de ce rez-de-chaussée sans porte et traversait le fin plancher de ma chambre si je tentais de m’y isoler. J’étais adolescente, mes contacts avec les autres étaient compliqués, et ce que j’entendais comme musique à la maison ne m’aidait pas à me fondre dans la masse. Et pourtant, quand elle passait ta musique, je ne pouvais m’empêcher de t’écouter avec plaisir.

Ta voix rocailleuse sentait la souffrance de ceux qui savent ce que c’est qu’avoir touché le fond, touché la douleur d’être vivant, touché l’envie d’être mort. J’ai toujours eu l’impression que tu parlais la même langue que moi. J’ai toujours senti un espoir derrière la douleur. C’est une sensation étrange de ressentir quelque chose au-delà des divergences de langues, comme une affinité. Tu parlais des femmes et de l’amour que tu leur portais. Les guitares du Partisan me faisaient frissonner. Tu parlais de la guerre, de l’Homme et de sa noirceur. Tu chantais la vie de tous les jours, les lettres qu’on écrit, les oiseaux sur les branches. Tu racontais la vie, parfois à travers la mort. Tu parlais de l’espoir au-delà de l’errance. Tu étais un poète. Tu m’as toujours fait flotter dans les mots et les rêves…

Malgré mon incrédulité face à l’Amour, en t’écoutant j’ai eu envie de croire qu’un jour quelqu’un me ferait danser to the end of love. Et je l’ai depuis trouvé, celui qui voyage à mes côtés, à l’aveugle, au jour le jour. Probablement que c’est un peu grâce à toi que j’aimerais donner ton prénom à un enfant.

Mais ce soir, une question me taraude, maintenant que tu n’es plus là, qui nous demandera pourquoi nous ne revenons pas de la guerre, la guerre entre les riches et les pauvres, la guerre entre hommes et femmes, la guerre entre les hommes… Qui nous rappellera qu’il y a toujours de l’espoir…

Ta voix, tes phrases, ta présence, tes mots, tout ça, toi, tu me manqueras, Léonard.

Sincerely, Abigaïl S.


5 réflexions sur “Dance me to the end of love

  1. Un critique de rock, grand fan de Léonard Cohen, l’avait surnommé « le Barry White du folk ».
    Sa voix grave était fabuleuse, même sur son dernier album.
    Merci pour votre très bel hommage.

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  2. Jeudi, parti pour acheter un nouveau disque dur externe, j’ai fait un détour par le rayon de disques du magasin. Un coffret des 11 premiers disques de Léonard Cohen trônait au milieu des promos…..j’ai craqué !

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